La grève du lait a démarré timidement en Europe
- Par Eric de La Chesnais
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- Pour le consommateur, l’impact du mouvement ne devrait pas être visible avant mardi.
L’EUROPE laitière, qui s’était donnée rendez-vous hier sur la pelouse des Invalides, a appelé ses adhérents à une « grève du lait » illimitée, qui se traduira par un arrêt des livraisons aux laiteries. Le mouvement a timidement démarré hier dans plusieurs pays de l’UE, notamment en France.
« J’appelle tous les producteurs français et européens à suspendre leurs livraisons de lait dès la traite de ce soir, a lancé Pascal Massol, président de l’Apli (Association des producteurs de lait indépendants), une organisation concurrente de la FNSEA qui recrute avec succès les déçus de l’accord sur les prix du lait négociés en juillet dernier. Environ quatre cents éleveurs de six pays producteurs (France, Allemagne, Italie, Suisse, Hollande et Luxembourg), soit 70 % de la production laitière européenne, avaient fait le déplacement à Paris, malgré l’ensilage de maïs qui débute actuellement.
Après plus d’un an de crise, ils continuent de dénoncer l’effondrement du prix du lait et la dérégulation du marché décidée par Bruxelles avec la disparition programmée des quotas. « Après avoir arpenté les campagnes cet été, nous sommes prêts à faire la grève illimitée », a expliqué le leader de l’Apli, membre du syndicat européen EMB (European Milk Board), en présence de ses homologues du Vieux Continent. « À titre personnel, je ne livrerai pas mon lait », a ajouté le président de l’EMB, Romual Schaber, responsable outre-Rhin du syndicat BDM.
« Nous le jetterons à la fosse »
Concrètement, les éleveurs continueront à traire leurs vaches pour éviter que celles-ci ne tombent malades, mais ils ne vendront pas leur lait. « Nous en ferons don aux associations caritatives, et, le cas échéant, nous le jetterons à la fosse car aujourd’hui, avec les prix actuels, nous n’avons plus rien à perdre ! », a précisé Daniel Condat président de l’OPL (Organisation des producteurs de lait) autre syndicat français adhérent de l’EMB.
L’appel à la grève a été entendu par de nombreux paysans. « Bien sûr, je la suivrai ! Il nous manque 20 000 euros par an pour boucler notre budget », explique Sylvie Lamour, exploitante à Ploudaniel, dans le Finistère. Mais tous les éleveurs ne participeront pas au mouvement.
Du coup, les laiteries ne sont pas trop inquiètes. Elles ont fait le plein de lait avec des collectes supplémentaires et elles pensent que la grève sera peu suivie. « Ce mouvement ne représente que 20 % des éleveurs français », relativise l’Association des transformateurs de lait. En effet, beaucoup d’agriculteurs devraient suivre la position du syndicat majoritaire, la FNSEA, qui a fermement rejeté l’appel à la grève. « C’est une aberration que de jeter le fruit de son travail », estime Jean-Michel Lemétayer, président de la FNSEA . En outre, les autres pays européens suivront-ils les Français ? « Nous prendrons notre décision la semaine prochaine au regard de ce qu’il se passe en France, souligne Werner Locher, éleveur près de Zurich et secrétaire national du BIG-M, membre de l’EMB. Dans les rayons, il faudra attendre mardi prochain pour mesurer l’impact réel de la grève, mais on ne prend pas le chemin de la pénurie de lait ou de yaourts.