La grève du lait divise les éleveurs
« J’appelle à l’ouverture des vannes, dès la traite de ce soir ! »Après des mois et des mois d’ébullition, la grève du lait est lancée. Devant plusieurs centaines de producteurs rassemblés sur l’esplanade des Invalides à Paris, Pascal Massol, le président de l’Association des producteurs de lait indépendants (APLI), a solennellement appelé hier les éleveurs français et européens à ne plus remplir leurs tanks ni approvisionner leurs clients comme Entremont, Lactalis ou Danone. Ceci pour une durée indéterminée.
Le mouvement pourrait s’étendre dans certains pays d’Europe. D’autres membres de la fédération European Milk Board, les Allemands et Néerlandais, s’affirment solidaires sans appeler officiellement à la grève, pour ne pas être sanctionnés par les autorités chargées de la concurrence. L’organisation de producteurs belges MIG devait, pour sa part, soumettre le sujet hier soir à ses membres.
Divergences parmi les Vingt-Sept
Sur le papier, si les éleveurs jettent leur lait ou le donnent directement à des consommateurs, les prix devraient remonter. Pas sûr cependant que cela suffise. Le mouvement annoncé hier est en effet le fait de syndicats minoritaires, l’APLI et la Coordination rurale. La FNSEA, majoritaire, s’y montre, elle, très hostile. C’est une « aberration », a redit hier son président, Jean-Michel Lemétayer, sur BFM Radio, affirmant que la grève serait « peu suivie ». La FNSEA continue à se féliciter de l’accord sur le prix du lait qu’elle a signé avec les industriels en juin, même si nombre d’agriculteurs jugent que les tarifs ainsi avalisés sont bien trop faibles.
Si les syndicats se montrent ainsi divisés, les pays européens le sont également. Faut-il ou non libéraliser le marché laitier ? Comment éviter que les prix jouent au yo-yo ? Lundi, à Bruxelles, les ministres de l’Agriculture des Vingt-Sept ont affiché leurs divergences sur le sujet. Les uns souhaitent la poursuite de l’ouverture du marché. D’autres, comme la France et l’Allemagne, plaident au contraire pour le maintien des quotas laitiers. Derrière les prix du lait surgissent ainsi des questions plus globales sur la régulation des marchés, et la place des agriculteurs dans l’économie. Ce que montre bien le discours de Pascal Massol : « Qui peut nous reprocher de vouloir garder dans notre vocabulaire les mots : pâture, foin, rosée, orage, fourche, crème, coq et même fumier ? »a-t-il demandé hier aux Invalides